Les résultats de l’étude réalisée par la Chaire de recherche du Canada en économie écologique de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) ont été publiés la semaine dernière dans la revue scientifique «Extractive Industries and Society». On y apprend que plus de 80 % des résidents sondés souhaitent voir les anciens sites miniers transformés en espaces verts.
De plus, les répondants favorables au verdissement vont jusqu’à affirmer qu’ils seraient prêts à payer entre 5 $ et 25 $ par année durant trois ans pour financer la démarche.
Par voie de communiqué, la chercheuse Ann Lévesque, doctorante à l’UQO, s’est dite «agréablement surprise de la participation et de l’ouverture des gens à donner une deuxième vie aux haldes minières et à contribuer à améliorer l’environnement».
Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en économie écologique, Jérôme Dupras explique que cette enquête auprès de la population s’inscrit dans le cadre d’un projet plus large dont l’objectif est la création d’un immense puits de carbone en végétalisant d’anciens sites miniers dans les régions de Chaudière-Appalaches et de l’Estrie.
L’entreprise Viridis Environnement se spécialise dans la revalorisation des boues usées. Ces résidus extraits des usines de traitement des eaux peuvent être réutilisés pour fertiliser un sol stérile. De l’autre côté, l’entreprise Granilake qui possède les haldes de résidus amiantés cherche une manière de valoriser cet imposant territoire.
«L’idée, c’est de voir comment on peut faire de l’économie circulaire et revaloriser les boues. L’une des avenues testées c’est de valoriser les boues sur les haldes stériles et la manière d’assurer la rétention des boues serait de planter des graminées, des végétaux, des arbres pour refaire un couvert végétal», décrit Jérôme Dupras en entrevue à La Presse Canadienne.
Une équipe de chercheurs œuvre à développer un plan d’action en génie végétal afin de déterminer les conditions nécessaires et les types de végétaux à prioriser pour que l’opération soit un succès. Toutefois, les chercheurs voulaient également s’assurer que la population locale avait un véritable intérêt envers la transformation des lieux. On voulait aussi savoir quel genre d’usage les citoyens voudraient faire de ces aménagements.
D’après les résultats obtenus, 40 % des répondants considèrent d’abord que ces futurs espaces verts vont servir de stockage de carbone dans la lutte aux changements climatiques. Puis, 30 % des répondants voudraient pouvoir y pratiquer des activités récréatives en plein air et 14 % aimeraient y voir aménager des sentiers.
Par ailleurs, l’enquête a révélé un très fort sentiment d’attachement de la population à son héritage minier. Le paysage aride et rocheux fait également partie intégrante de cette identité locale, ont affirmé les répondants.
«C’est un autre des éléments forts de l’étude, souligne Jérôme Dupras. Il y a toute une dimension culturelle, patrimoniale pour les familles qui ont grandi dans cet environnement.»
Ce constat force les chercheurs à s’interroger sur des moyens de verdir les lieux sans totalement effacer le passé industriel minier de la région.
Urgence d’agir
Dans le récent rapport du Bureau d’audiences publiques en environnement (BAPE) sur «L’état des lieux et la gestion de l’amiante et des résidus miniers amiantés», publié en juillet, les commissaires qualifient de «prioritaire» l’importance de restaurer et de végétaliser les haldes à proximité de cours d’eau.
Les résidus amiantés sont nocifs pour la qualité de l’eau et de l’environnement. Les cours d’eau à proximité des haldes affichent un pH au taux d’alcalinité 100 fois plus élevé que la normale.
Bien que l’étude de la Chaire de recherche du Canada en économie écologique s’adresse d’abord au secteur privé, le message peut aussi interpeller le public et les décideurs.
«On leur présente une nouvelle alternative que ce territoire-là peut être revalorisé par du verdissement. On leur dit que 80 % de la population est favorable, alors je pense qu’il y a un intérêt pour les décideurs», observe Jérôme Dupras.